Je ne rêve que de lumière

17 juin > 12 octobre 2008

L’exposition-hommage consacrée à Moustapha Dimé montre la subtilité du re-emploi du bois flotté. Elle marque la troisième étape de la sculpture africaine après le sacré qui lui fut longtemps consubstantiel et l’approche de l’abstrait par des artistes du Zimbabwe. Cette deuxième vie donnée aux objets ouvre aussi la porte à un design original, visible dans notre boutique, librairie et restaurant.

Loin, très loin… Juste un souvenir et encore, je n’ai jamais eu le privilège de connaître cet artiste exemplaire d’absolu ! Rendre hommage est un acte grave qui suggère que l’on soit impeccable à la manière d’un guerrier. Les images qui restent de lui nourrissent mon imaginaire. Les mots retenus des rares interviews laisse transparaître un être flamboyant et serein.

Il y a quelques jours, je me suis rendu à Gorée et j’ai noté ceci : «le pèlerinage qui conduit à l’atelier de Moustapha Dimé est lumineux. Arrivé au bout de l’île, j’essaye de m’imprégner de l’atmosphère des lieux en vue de la scénographie à venir. La tête me tourne, le balcon sur la mer est rempli d’énergie. Au bout de la désolation, les riens abandonnés, la vacuité de nos égos en plein soleil. Cet espace métaphysique exténué cloue le visiteur en son centre ». Tel devrait être le dispositif, un rappel de ce cadre si particulier dans lequel oeuvrait Dimé guidé par cette pensée ; je le cite « je ne rêve que de lumière… ». Tapi dans l’ombre des caisses, je cherche au sein de ce déballage, le lien entre toutes ses œuvres, assemblages de restes, d’idées à l’abandon, des gestes dépouillés et mis en forme génialement comme un long poème entropique. Sur le rivage de l’île, le guetteur qu’il était nous a révélé qu’il était possible de survivre au désastre de la disparition tant qu’il y a la foi.

Les hasards de l’existence sont parfois bien heureux ! Il y a quelques mois Roger-Pierre Turine nous informa que l’exposition de Dimé qui s’était déroulée en 1999 à l’Hôtel de Ville de Paris était immobilisée faute de moyens financiers pour les rapatrier au pays. La fondation s’est alors engagée à ouvrir les caisses le temps d’une exposition et de prendre à sa charge le rapatriement des œuvres à Dakar. Reste à faire un vœu pour que cette œuvre majeure trouve un musée digne de ce nom au Sénégal qui a vu naître et travailler ce bel artiste que fut Moustapha Dimé.

Pour parfaire ce geste, il nous est apparu opportun et juste d’inviter celui qui fut son fidèle assistant Gabriel Kemzo Malou. Pendant son séjour, il réalisera un hommage à son maître défunt comme une suite des possibles…

Pierre Jaccaud